En temps de peste, pour un bel aïoli

Par Marcel GUIGOU

2 septembre 1721, sur les dix heures du matin, au cœur de l’orage…

Ce matin encore, Antoine BISSAREL assure sa rituelle tournée d’inspection. Soudain, stupeur ! Une longue file de braves gens attend calmement devant le local du rez-de-chaussée de la mai-son de ville dont la porte demeure inexorablement fermée à double tour. L’intendant de la santé a pourtant donné des ordres stricts à Jean CAPUS : Le "préposé de la distribution du pain" doit toujours ouvrir son local à l’heure et "expédier au plus vite les pauvres qui patientent sur le de-vant de la porte en attendant d’être servis". Monsieur de PERRIN, le chef des armées royales, vient d’ailleurs de le rappeler avec force : pour éviter d’aggraver la contagion, il est interdit de se rassembler à plus de trois. C’est une question de survie ! Et ce CAPUS qui n’est même pas encore là !

Comme il y a vraiment urgence, Antoine BISSAREL décide d’agir et d’aller en personne récupérer l’employé municipal aux Gorgues chez Lazare ANDRE où, lui a-t-on dit, il se trouve de-puis déjà un bon moment. Avec sa tête des mauvais jours, Monsieur BISSAREL monte donc aux Gorgues où, à sa grande surprise, il trouve notre homme, tranquille comme Baptiste, "man-geant un bel ayolli" en compagnie de Claude SUZANNE, André RIBOULET, Claude ESTIENNE et Jean FOUQUE. Mais, ce n’est pas tout.

Figurez-vous que "la porte du derrière qui vise à la campaigne est ouverte quoiqu’elle eût esté fermée à plâtre comme les autres du cartier de l’ordre des consuls" ! N'en croyant pas ses yeux, l’intendant voit rouge. Il reproche alors leur conduite à ces inconscients qui, en retour, "le chargent d’injures"… Mais on est où, là ?

Tout est dit, ou presque. (Suite et fin dans "Histoire[s] d’Auriol 3", une publication de l’ASPA parue en septembre 2024).

Vue aérienne du village d'Auriol pour illustrer Peste Aïoli